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ILOO DOMINIQUE (1924-1997): BIO-BIBLIOGRAPHIE / Par Charles Lonkama et Honoré Vinck
Annales Aequatoria 18(1997)545-550
Mr Dominique Iloo est décédé le 7 mai 1997, à Kinshasa. Son curriculum vitae, nous mène par toutes les étapes de l'éducation de l'élite coloniale. Né à Bokoté en 1924 de parents travaillant à la Mission, mais originaire de Ngomb'Isongu, il y fait son école primaire. En 1936 on le trouve pour une année au Petit Séminaire de Bokuma. De là, il passe à l'Ecole Normale de Bamanya, où il termine ses études en 1940, ayant été toujours le premier de sa classe avec plus de 90% des points. Il débute sa carrière professionnelle à Mbandaka comme commis au Département des Finances (1940-46?). Il était activement engagé dans les oeuvres de la paroisse de Bakusu (Cercle Excelsior). Ensuite, il devient enseignant au Groupe Scolaire à Mbandaka, fonction qu'il exercera jusqu'en 1958, année de son départ pour l'Exposition Universelle de Bruxelles, en qualité d'attaché au Pavillon des Missions Catholiques Congolaises. A cette occasion, il complète ses études par un "régentat littéraire" (2 ans) à l'Institut Saint Thomas d'Aquin à Bruxelles. Aprés l'indépendance, sans adhérer à un mouvement politique, il est nommé en juin 1961, Directeur Provincial de l'Enseignement à Coquilhatville. Il sera intégré dans le Conseil d'Administration de la Cegacom (SAB) et dirigera la Socophar, ensemble avec son ami de jeunesse, le syndicaliste Mr Dominique Ilito. Du 15 septembre au 7 décembre 1970, il sera Ministre de la Fonction Publique et du 18 octobre 1972 au 8 mars 1974, vice-ministre de l'Enseignement chargé de l'enseignement primaire. Dorénavant, il s'occupera de ses affaires commerciales, mais il restera actif dans sa paroisse Sainte Anne comme membre de la chorale latine et comme président de l'Assanef (Anciens des Frères des Ecoles Chrétiennes), en fonction duquel il assiste à son congrès mondial au Mexique. Monsieur Iloo est resté pendant toute sa vie en relation étroite avec Gustaaf Hulstaert. C'est sous son impulsion que ce dernier a reçu en 1973, le doctorat Honoris Causa à l'Université Nationale du Zaire. Il est resté profondément attaché à sa langue et à sa culture mongo. Plusieurs de ses écrits en témoignent. Le 6 décembre 1973, il écrivait au père Hulstaert:
"Après tout ce que vous avez fait pour notre pays en général, et pour les Mongo en particulier, il fallait bien, d'une manière ou d'une autre récompenser vos efforts. Vous avez été notre lumière, mais personne d'entre nous ne vous comprenait. Vous nous avez ouvert les yeux, mais nous croyions le contraire. Maintenant que la conjoncture du pays a changé, nous voici à la recherche de nos sources pour puiser la sagesse. Heureusement que vos écrits sont des mémoires précieuses".
BIBLIOGRAPHIE
1. 1945: Mes chers compatriotes et amis "Nkundo-Mongo", Le Coq Chante, (LCC), juillet 1945, 53-54. (Invitation aux enseignants à collaborer et à s'abonner au Coq Chante) 2. 1946: Bokomba (la stérilité), LCC, 15 janvier 1946, 3. 3. 1947: Mr l'abbé Nicolas Bowanga parmi nous, ibi, 1947, p.184. 4. 1948: Jengi (la dot), ibi, 1948, p. 26-27. 5. Coquilhatville fête Sainte Cathérine Labouré. Fille de la Charité, ibi, 1948, p.111. 6. 1949: Nda wiji wa jengi (au sujet de la dot), Etsiko (périodique à Coquilhatville) 1 janvier 1949, p.9. 7. 1950: Liango je mbul'ekalasi (le début de l'année scolaire) ibi, mars 1950, p.4-5. 8. 1951: La littérature dans le Vicariat de Coq, ibi, août-septembre, 1951, p.12-13 9. 1952: Ele banoju baanji b'Etsiko (aux jeunes lecteurs d'Etsiko sur l'importance des études) ibi, octobre 1952, p. 7-8. 10. Lina lindet'iso Episi ekiso Tata liongi nde ? [le nom père attribué à notre évêque, convient-il?) ibi, décembre 1952, p. 3. 11. 1955: Fête de Noël au Cercle Excelsior, Lokole Lokiso (LL), 15 janvier 1955, p. 6. 12. Liongo ja bana (l'éducation des enfants), LL, 15 février 1955, p.1 et ler mars 1955, p.2 et 8 13. Discours de Mr Iloo Dominique sur l'importance du lomongo, LL, 15 août 1955, p.2 et 8.
Sous le pseudonyme "Vidi" 14. 1949: Loyasinaka jwamby'ntele l'eyangela (prenez garde, cessez avec les médisances et la calomnie), Etsiko, novembre, 1949, p.6 15. 1955: Lettre ouverte à un ami (Mongo) LL, 1 janvier 1955, p. 5 16. 1958: Manifestation d'adieu et de sympathie (chronique de l'Otraco), ibi, 1-15 janvier 1958, p.4.
Notices biographiques: -Baotswa mpoto (ils sont partis pour l'Europe: Iloo et Bamala), Lokole Lokiso, ler avril 1958, p.6 -Sa participation à l'Exposition Universel le de Bruxelles, ibi, ler juillet 1958, p. 5 (par Michel Bamala).
ANNEXE 1
Nous publions ici une lettre de Mr Iloo à Gustaaf Hulstaert avec la réponse. Les originaux se trouvent dans les Archives Aequatoria, Bamanya, Microfiches CH 37 et 162
"ILOO LOKWA Kinshasa, le 3 mars 1988 B.P. 7163 KINSHASA I.
R.P. Gustave Hulstaert M.C. BAMANYA.
Révérend Père, Losako!
Depuis longtemps je cherche l'occasion de vous arriver à Mbandaka (Bamanya) mais je ne-parviens pas à me libérer de mes occupations quotidiennes. Et depuis la mort du R.F. Réné Lechat, j'ai toute la charge de l'ASSANEF.
Un problème me préoccupe depuis plusieurs années. Je ne trouve ni solution, ni une ouverture de solution. Il s'agit des migrations "Mongo". Pour ma part, je suppose qu'il y a eu deux ou plusieurs migrations. Car, s'il est vrai que tous les Mongo appartiennent au même et grand groupe ethnique et linguistique (avec certaines variations), il me semble aussi vrai que les us et coutumes varient de telle grande tribu à telle autre. Je crois vous avoir dit un mot là-dessus, mais nous n'avons pas eu l'occasion d'en parler davantage. Je pousse ma curiosité pour mieux saisir les phases successives de ces migrations en vue d'élucider pas mal d'hésitations à pouvoir m'expliquer devant des jeunes gens avides de savoir plus que nous. Et ils ont raison.
Voici mon propos :
1. Les "Mbole" sont des Nkundo-Mongo, mais ils ne connaissent pas l'épopée Nsong'a Lienja. Ils ne connaissent pas non plus la salutation "Losako" par contre, ils ont les "Ekofo" ou "Nkumu" et les groupes d'âge "Inongo" qui ne remonterait pas plus loin que Nsong'a Lianja.
2.Les Ekonda sont aussi"Nkundo Mongo". Eux connaissent "Nsong'a Lianja", connaissent la salutation "Losako" et possèdent les "Nkumu".
3.Les autres "Mongo", tant dans la sous région de l'Equateur (sauf Bikoro) que dans le reste de la sous région de la Tshuapa, ignorent les "Ekofo" et les "Nkumu". Ils connaissent le nom "Nkumu": notable et non "Nkumu" institution ou confrérie.
Je me réfère à vous pour avoir vos avis et considérations et surtout votre lumière pour essayer de clarifier cette situation qui, pour moi est encore nébuleuse. Dans l'espoir d'avoir de vos nouvelles et sûr de votre réponse en tant que personne autorisée à ce genre de études, je vous prie de croire, Fafa Ngosita, en l'assurance de mes sentiments très respectueux.
Iloo Lokwa" (signature)
[Réponse de Hulstaert] 21-3-88
"Cher Dominique, Merci pour votre bonne lettre qui pose un problème important. Je vais essayer une réponse qui puisse vous satisfaire.
Vous avez bien raison. Il y a deux migrations, même trois (les Bakutu de Boende qui semble bien plus vieille). Ces deux principales, on les nomme parfois: la vieille (au sud, Maindombe) et la jeune (le nord). La différence se manifeste clairement, comme vous le dites, dans la culture, surtout l'organisation sociale; mais aussi dans beaucoup de détails d'autre nature et dans la langue. Comment expliquer ces différences est un problème très ardu. On peut proposer l'hypothèse, qu'à partir d'une souche commune quelque part au nord (dans le Zaïre ou bien au-delà), un premier bloc s'est détaché, et dans ses migrations a rencontré d'autres populations (p.ex. apparentés aux ethnies du Kwilu-Kwango, dont il a assimilé une partie de la culture, spécialement des éléments d'organisation sociale (nkumu, ekofo, etc.) et linguistiques. Après la séparation, les deux groupes se sont développés chacun dans sa ligne. Par exemple: les jeunes demeurés isolés par exemple dans la grosse forêt entre Lopori et Luwo, ont continué le système socio-politique sur la base unique de la parenté, développant aussi un grand art oral (Lianja), tandis que les méridionaux développaient une organisation politique à côté de la parenté et se perfectionnaient dans la chorégraphie. Comment et par quelles voies les deux blocs se sont retrouvés dans la cuvette centrale est encore inconnu. Aussi de nombreux problèmes de détails attendent une solution. Il y a encore la question de l'évolution et des migrations des Batetela et des Mpama de Lukolela, d'origine mongo mais acculturés ailleurs.
Pour tout-cela il faut encore de nombreuses recherches sur le terrain et des études comparatives avec d'autres populations proches ou éloignées. G. Hulstaert"
ANNEXE 2
Discours de M. Dominique Iloo à l'occasion de l'inauguration de la salle d'étude du Cercle Excelsior à Coquilhatville, le 4 août 1955
"Monsieur le Gouverneur, Excellence, Messieurs,
Monsieur le Président du Cercle vient de vous remercier d'avoir voulu rehausser, de votre présence, l'inauguration officielle de notre section d'études.
Je suis heureux de prendre la parole, première occasion peut-être, devant un si imposant auditoire. Qu'on ne m'en veuille pas je n'abuserai pas de votre patience ! Je serai court dans mon petit exposé si important. Après, nous pourrons discuter ensemble sur certaines questions et essayerons de prendre les décisions les plus satisfaisantes. L'émancipation des Congolais vers la civilisation occidentale pose beaucoup de problèmes. L'un de ces problèmes est celui de nos langues maternelles. Les avis sont partagés au sujet de ce problème. Les un opinent pour la suppression pure et simple de ces langues dans les écoles. D'autres tolèrent que ces langues ne se donnent qu'aux écoles primaires. D'autres, encore défendent leur langue et sont fiers de la parler et de l'écrire. D'aucuns voudraient unifier les langues pour tout le Congo. Ce désir est quasi irréalisable. Le problème est très complexe. Il est de la compétence des linguistes. Nous nous bornerons à vous entretenir de notre Lonkundo-Lomongo.
La Radio pour Congolais, à l'ouverture de ses émissions, exhorte BANGALA, BALUBA, BAKONGO, BASHWAILI... mais ne cite pas les MONGO. Or, le Lonkundu-Lomongo est une des grandes langues dans la cuvette du Congo.
IMPORTANCE. Notre langue, LONKUNDO-LOMONGO, est parlée par un nombre important d'habitants (un million et demi). Elle s'étend, avec les dialectes qui la composent, aux districts de la Tshuapa et de l'Équateur, au nord des Provinces de Léo et de Luluabourg; à l'ouest de la Province de Bukavu et au Sud de celle de Stan. La situation démographique qui, jadis était mauvaise, nous donne aujourd'hui un signe sensible d'amélioration.
RICHESSE. Notre langue, Messieurs, est riche. Je dirai plus, TRES riche. En quoi consiste cette richesse? Comme dans d'autres langues, elle consiste dans la possibilité d'exprimer clairement le plus grand nombre d'idées et de sentiments. Et si nous désirons approfondir son étude, elle peut toujours s'enrichir, d'autant plus que son étude est facile. A quoi reconnaît-on cette facilité? A la régularité de sa grammaire. D'aucuns parmi vous ont apprécié nos fables et contes sans oublier ( LE LIANJA), et ont goûté la beauté de notre langue dans nos proverbes et chants. Bref, notre langue est riche, simple et belle.
UNIFICATION. Le Congo, grand pays, 80 fois la Belgique, aurait il une langue unique? Nous répondrons négativement. Il s'enorgueillerait d'en avoir 3 ou 4 grandes. C'est ainsi que les linguistes s'occupent actuellement à unifier plusieurs dialectes. L'unification du Lomongo est-elle donc possible et souhaitable? D'abord, son unification est utile. Elle faciliterait la compréhension entre un Mongo (Mbole de Salonga p.e.) et un Mongo de Basankusu. Ces deux hommes ont comme langue le lomongo mais de dialecte différent. Elle est ensuite souhaitable. Car au point de vue économique, elle aurait l'avantage de faire imprimer des livres qui se vendraient à un prix relativement bas. Mais si la langue n'est parlée que par un groupe ethnique restreint ces mêmes livres coûteraient plus chers. Les possibilités de l'unification seraient facilitées par l'impression de livres de prières, de grammaire, de lecture etc.. Donnons un exemple: Notre Vicariat compte au moins plus de 10 dialectes. Malgré la diversité de ces parlers, les prières se récitent en lonkundo, tant à Boende (Ntomb'a Nkole, Bakutu, Ekota, Mbole) qu'à Flandria et à Bokuma. Dans toutes nos écoles primaires, les élèves lisent les mêmes livres de lecture en lonkundo. Si tous les Mongo s'entendaient ainsi, voici une difficulté déjà aplanie. Ces possibilités dépendent, Messieurs, de la bonne volonté des Européens, nos tuteurs. Ils connaissent scientifiquement les règles régissant la matière. Ils disposent de moyens que nous n'avons pas. Mais Messieurs, et ici je m'adresse spécialement aux Mongo qui m'écoutent, les possibilités dépendent également de nous. Elles sont internes et externes. - INTERNES parce que les dialectes qui constituent le Lomongo sont suffisamment rapprochés, et il y a toujours moyen de les unifier. - EXTERNES. Les Mongo veulent-ils, eux-mêmes unifier leur langue? Si la réponse est affirmative, il y aura espoir de réussir. Ne dit-on pas que VOULOIR c'est POUVOIR? Dans le cas contraire, nous risquerions de perdre un patrimoine riche et cher. Et une fois perdue, notre peuple s'avouera déchu. Existe-t-il des peuples sans langue maternelle? Disposons-nous de moyens pour cette unification? A vous, Messieurs, de les chercher."
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