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JEAN ROBERT BOFUKY (1904-1976): BIO-BIBLIOGRAPHIE / par Honoré Vinc
Extrait de Honoré Vinck, Annales Aequatoria 14 (1993) 547-557
"L'art d'écrire, c'est plus que le moyen de devenir soi-même, c'est le moyen de rester
soi-même aux yeux d'autrui, d'affranchir notre personnalité de l'espace et du temps" J.-R.
Bofuky, Le Coq Chante 4(1939) n. 14, p.6
Mr Jean Robert Bofuky n'est connu ni de J.-M. Jadot (Les écrivains africains du Congo Belge
et du Ruanda-Urundi, ARSOM, Bruxelles, 1959) ni de L. Kesteloot (Les écrivains de langue
française: maissance d'une littérature, ULB, Bruxelles, 1965) ni de Mukala Kadima Nzuji (("La
littérature zaïroise de la langue française", ACCT-Karthala, Paris 1984). De son côté, il ne
semble s'attacher à aucune tendance. On ne le rencontrons ni dans "La Voix du Congolais"
(1946-1959), ni dans "Brousse" (1939-1960), ni dans "Jeune Afrique" (Elisabethville,
1947-1960). Il se cantonne dans les périodiques mongo de Coquilhatville, notamment: "Le Coq
Chante" (1936-1948) et Lokole Lokiso (1955-1960). Nous y avons identifié 35 textes de valeur
et de longueur inégale signés: "Jean Robert Bofuky".
J.R. Bofuky, fils d' Ikuku et de Bofaya, est né en 1904, à Ntomba, village de la chefferie
Bokala, chez les Losanganya, Mongo de l'Ouest (R.D. Congo). Nous n'avons pas pu établir avec
certitude l'endroit où il avait fait l'école primaire et secondaire. Il a été d'abord engagé
en qualité de clerc chez l'Interfina à Coquilhatville et en 1939, il est enrôlé dans la Force
Publique et caserné au Camp Léopold (actuellement Camp Kokolo) à Kinshasa, où plus tard, il
exerça les fonctions de sergent comptable, jusqu'en 1946, année de son départ de l'armée.
Entre 1937-1940, il publie principalement des notices ethnographiques, des récits, des
moralités et des fables. Après la guerre, en 1946, il fait irruption avec son plus beau poème:
"A ma terre natale". Il inaugure ainsi une série de 23 textes poétiques en français.
En février 1946, nous le rencontrons "en route" vers le Kivu. Il est à Kibali, dans l'Ituri,
en 1947 en qualité de clerc au Colonat. En 1955, nous le retrouvons, dans même région, comme
sténodactylo au CCAFI.
Peu après, il doit avoir été engagé comme clerc à la Sûreté à Bukavu. De juin 1957 à juin
1958, il passe un congé à Coquilhatville. C'est à cette époque qu'il écrit et publie ses
poèmes en français dans "Lokole Lokiso".
Il aurait été de retour à Bukavu pour un bref moment, car en 1959, il est à Léopoldville où il
se lance dans la politique. Il est signalé comme Président-Fondateur du "Parti
Traditionnaliste Congolais" qui rejoint vite l'"Union Congolaise".
Plus tard, jusqu'à sa mort accidentelle en 1976,il présenta les émissions en lomongo à la
radio Léopoldville.
J.-R. Bofuky est à situer dans la ligne de la poésie qualifiée par Mukala Kadima Nzuji de
"panygérique, intimiste, rustique, moralisateur, et spiritualiste" (p.30). Pendant que les
auteurs plus connus comme Roger Bolamba et Jean-François Iyeki, touchent tardivement au
courant de la négritude, Bofuky y restera étranger.
Lukusa Menda a fait une analyse critique des textes de Bofuky dans Annales Aequatoria
16(1995)417-466.
Je laisse suivre ici deux textes sur un même thème: la fidélité (ou l'infidélité) dans le
mariage. Le premier de Bofuky, en français, se situe dans la modernité, le deuxième est un
poème ancien, d'origine mongo tout comme Bofuky.
LA FIDELITÉ D'UNE JEUNE FEMME
Votre collier, je vous le rends,
Car j'ai juré fidélité
Et de ma simple qualité,
Mon mari me confie ce rang;
Pourtant ne soyez pas confus,
L'amour n'étant, lui, qu'un désir
C'est abîmer votre plaisir
En manifestant mon refus.
Vous tenez à me posséder
Et à me rendre heureuse,
Si je vous parais sérieuse
Ma main, je ne puis vous céder;
Mon mari m'a ouvert le cœur,
Dont je détiens le souvenir:
Ma promesse je dois la tenir
Il m'a conquise, ce vainqueur;
Mon mari est un être cher,
Le confident de mon rêve
Et comme la vie est brève,
Je garde mon foyer et mon éther;
Je porte ma voix sonore
Et mon écorce humaine
Vers le cours de la fontaine
A cet homme que j'adore.
LIALA (MARIAGE)
par BAMPELE (G. Hulstaert, Poèmes mongo modernes, ARSOM, Bruxelles, 1972, p.12-13)
Moi et mon mari nous nous sommes battus
Mon mari m'a battue
J'allai dans mon village la nuit
Au matin le mari arriva
Moi j'expose mon cas
Lui dit ensuite
Papa et maman ont donné gain de cause à mon mari
Mon frère est stupide
Il voit que Boyoyo me frappe
Mon frère dit "il a versé la dot"
Tu es devenu comme une esclave
Entends-tu la manière d'une femme?
Le poème de Bampele a une origine rurale (Ekota, près de Boende). Celui de Bofuky est situé
dans le nouveau contexte urbain. Regardons le contraste entre les sentiments des deux femmes
confrontées à un même problème. La femme de Bofuky est d'une sensibilité, porteuse d'un
nouveau critère d'amour: la relation personnalisée, à l'opposé de celle de Bampele qui ne
ressent que les coups de son mari.
BIBLIOGRAPHIE
Les éléments bibliographiques sont mentionnés par le numéro et/ou la date de parution du
numéro du périodique où ils sont parus, suivis par la page. Souvent l'auteur a indiqué la date
de composition du texte. La traduction des titres en lomongo suit entre parenthèses ainsi que
l'indication du genre du texte. Il n'est pas exclu que l'auteur ait publié d'autres textes
dans des périodiques du Kivu, mais je n'ai pas pu dépouiller ces titres. Pour situer les
périodiques locaux mentionnés ici voir Archives
(1) Dans "Le Coq Chante"
1937
18 mai, p.2-3: Onyang'ol'a nkema, wofwak'ombolo (si tu manges avec le singe, pense au daman)
[fable]
1939
12, 1 février, p.8: Elu pour le ciel [nécrologie]
12, 1 février, p.11-12;
13, 15 février, p.15-16: Comme au temps du Roi Salomon, une histoire vécue par l'auteur où on
parle d'un enfant perdu et retrouvé. [histoire événementielle]
13, 1 mars, p.15: L'Ikelemba en deuil [nécrologie et fait divers]
14, 15 mars, p.6: On nous juge sur nos écrits [moralité]
15, 1 avril, p.8-9: Esambelo ea bakambo eki bankoko joso (le jugement au temps de nos
ancêtres) [notice ethnographique]
16, 5 Mes chers lecteurs
23, 1 août, p.6 : Wambo ele Boketsu Amandus (Réponse à Boketsu A.) [notice ethnographique]
25, 1 septembre, p. 15: Tofetefele,tolot'oemba la nkaka ey'okonda (Nous ne parlons pas, nous
craignons de chanter à cause de la rigueur de la forêt) [ethnographie]
27, 1 octobre, p.9 : Ofolange bolembo totswake nd'anse b'ofambu (Si tu ne veux pas le latex,
n'allez pas sous l'arbre à latex) [moralité]
28, 1 novembre, p.5-6: Bondenge la bole bokai, ila nk'okwa (Quoique le cœur de bœuf aie un
goût aigre, met seulement le sel) [moralité]
29, décembre, p. 10-11; Boleo nkina bongilo (deuil ou abstinence) [moralité]
1940
3, mars, p. 10-11 : Nkalo ele bafafa (La réponse aux prêtres) [réponse au questionnaire sur le
Lilwa; ethnographie]
4, avril, p. 11-12: Emi nde bombotsi (Moi, je suis civilisé) [moralité]
4, avril, p. 12: Loyasinaka jwamb'entele (Comportez-vous bien, cessez des commérages)
[moralité]
1946
5, p.30, A ma terre natale [Poème]
14, p.83, Liale j'impombonjemba (Le mariage monogame) [moralité]
1947
1, p. 10, Nsao y'anolu b'amato (Le chant d'une jeune fille) [Poème]
5, p. 52.59.64-76.93: Boté (pratiques magiques) [Ethnographie]
9, p.105: Nsuno nda nkalo ea Mr l'Abbé Nicolas nda bekakano bya Ekoto Pascal [Leçon morale sur
la réponse de Mr l'Abbé N. aux préoccupations de E.P.]
(2) Dans "Lokole Lokiso"
1955
12, 15 juin p.3 : [Lettre aux rédacteurs]
15 octobre p.3 [Note sur la session des sciences humaines à Bukavu]
1958
1-15 janvier, p. 5, Poème; - Petit adieu [Poème daté de Bukavu, 2 octobre 1957]; - Avant
l'embarquement [Poème daté Kivu, mars 1957]
3-4, 1 février, p.5; -Ereka [Poème]; -Humour poétique [Poème daté Coquilhatville, 26 janvier
1958].
5-6, 15 mars, p.5: Aux airs d'Iyonda [Poème daté de Coquilhatville, 26 janvier 1958]
8-15avril, p.5: [Poème sans titre, daté du Kivu, juin1957]
9, 1 mai, p.1: - [Poème sans titre]
10, 15 mai, p.5, - Le progrès [Poème daté Coquilhatville, 12 avril 1958]; - Hallucination
[Poème daté Coquilhatville, 19 avril 1958]; - [Poème sans titre, daté Coquilhatville, 20 avril
19-58]
11, 1 juin, p.1 [Poème sans titre]
13, 1 juillet, p.7: La fidélité d'une jeune femme [Poème]
1 septembre, p. 6 [Poème sans titre]
15, 15 septembre, p. 5 Au Colonel Vandewalle [Poème daté Coquilhatville, 28 juin 1958]
20, 15 décembre, p.5 [Poème sans titre]
1959
1, 1 janvier, p.1 [Poème sans titre]
2, 15 mars, p. 1 [Poème sans titre]
2, 15 mars, p.8: A André Louwagie [Poème]
5, 1 mai, p. 1, Entre nous [moralité] |
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