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thèmes > géographie sociale et architectures coloniales > autres > Projet d'un village chrétien à Nkile | ||||||||
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Projet d'un village chrétien à Nkile (Equateur) en 1945 / Par Honoré VinckParu dans: Annales Aequatoria 14 (1993)443-456 INTRODUCTIONA l'Équateur zaïrois, les Pères Trappistes avaient leurs "Fermes-Chapelles" et "Chapelles-écoles", caractérisées par la présence d'un catéchiste-enseignant qui, au moins à l'origine, disposait d'une petite exploitation agricole. Le village était installé à une certaine distance du village traditionnel et s'en démarquait par l'application d'une vie chrétienne rigoureuse: monogamie, prières, exclusion de pratiques licencieuses. Il était sous l'autorité du catéchiste qui dépassait en beaucoup celle du "capital' de l'Etat. Dans les années 20, sous l'action de Van der Kerken et d'autres autorités supérieures de l'administration de la province, ces villages ont été dissous ou même brûlés. Mais en dehors de ces quelques faits sommaires, nous connaissons encore mal les réalités vécues dans ces villages chrétiens de la Cuvette Centrale du Zaïre. Un autre type de village chrétien était celui d'un village attaché à la mission même. Ceux-ci ont persisté jusqu'à nos jours. Ils étaient sous l'autorité du missionnaire. L'expérience se basait sur le système des "réductions" des Jésuites au Paraguay. Il est important de le rappeler, car le cas sous examen s'approche plus de ce modèle que de celui de l'ancienne ferme-chapelle ou du village-mission. Le dossier sur la "dénatalité mongo" (1) nous a transmis un long rapport d'inspection mené dans la Tshuapa, par le Procureur du roi à Coquilhatville, Mr de Waersegger (2), datant de fin 1945. Parlant des remèdes, le procureur s'écarte de l'expérience dans le groupement Nsongo (3), initiée par le gouverneur Henry, et se prononce pour une tentative de villages nouveaux, sous l'autorité d'une mission, et régis selon les principes chrétiens et corporatistes. Il situe le projet dans la perspective globale de la colonisation: l'intégration des Chrétiens dans la culture occidentale. Il est étonnant que le Père Hulstaert n'ait pas réagi à cet aspect de la proposition. Est-ce la raison pour laquelle Boelaert ne mentionne nulle part le projet ? Le Procureur ajoute à son rapport un document de 5 pages, contenant une proposition précise pour la fondation d'un tel village. L'auteur du document n'est pas nommé, mais par une lettre du Père Hulstaert au Père Boelaert, nous savons qu'il doit être attribué à Mr Paul Ngoy (4), à cette époque enseignent au petit séminaire de Bokuma. Nous ne connaissons pas à qui doit être attribué la paternité de l'idée et en quelle mesure les pères Hulstaert et Boelaert auraient été impliqués dans la rédaction du texte. Le terrain même, Nkile, était un "elali", village abandonné, selon la tradition, en 1910, à cause de la maladie du sommeil (5). Il est situé sur la Ruki, entre Ikua et Bokuma, à environ 60 km en amont de Mbandaka. Le 1er mars 1945, Boelaert écrit à Mgr.Van Goethem concernant ces idées: "Si je ne me trompe pas, il y a quelques jeunes sérieux qui veulent quitter les centres et retourner au village et là mener une vie simple et tranquille, cultiver la terre et mettre les enfants au monde en toute tranquillité." Hulstaert propose de céder une partie de la mission de Bokuma pour ce but. Il demande à Monseigneur d'exposer ces idées au Gouverneur Général à l'occasion de sa visite à Léopoldville. En 1945, Hulstaert écrit à Boelaert: "Comment ça va avec Mr Brebant (6)? Vous vous êtes parlé? N'est-il pas pour l'essai des villages agricoles en vue d'une solution de la dénatalité (affaire Nkile?)" (G.H. à E.B., 12.10.45). Et Mgr Van Goethem serait d'accord: ''Des villages spéciaux pourraient aller, dit-il, mais il faut quelques essais" (G.H. à E.B., 21.9.45). Mais le rapport du conseil de province pour la dénatalité tenu peu après, en 1946, n'en parle pas. En 1947 encore, Hulstaert écrivait: "Le projet d'un village modèle a été longtemps arrêté. Mais Paul Ngoy y tient quand même. Dernièrement je pouvais parler avec l'agronome d'Ingende et il veut y collaborer. J'attends de ses nouvelles et de l'administrateur territorial d'Ingende. Peut-être Paul Ngoy pourra-t-il commencer alors" (Hulstaert à Mlle Hélène, 16-3-47). Plusieurs personnalités de la province y étaient favorables: Mr Brebant, Commissaire de district; Mr Schwers (7), médecin provincial et Mr de Waersegger (susnommé). Je publie en annexe les textes suivants dont les originaux se trouvent dans les Archives Aequatoria à Bamanya Fonds Boelaert, Ethn. Microfiches EB 77.78.
Nous ne connaissons pas la réaction de la commission provinciale de la dénatalité ou du conseil provincial sur le projet. Mais il est sûr qu'on n'a jamais commencé à le mettre en pratique. NOTES 1. "Dénatalité mongo": Comme pour certains a autres peuples de la Colonie Belge, la natalité du peuple mongo était fortement en régression. Depuis les années 1930, Monsieur Lodewijckx, en collaboration avec les pères Boelaert et Hulstaert, avait commencé une campagne de recherche pour en découvrir les causes et les remèdes. C'est dans ce contexte que se situe notre dossier. 2. Léon de Waersegger, (1902), au Congo depuis 1927. Il était Procureur du Roi à Coquilhatville, puis substitut du Procureur Général à Léopoldville. 3. L'expérience Nsongo: En 1945, quelques villages en Territoire de Befale, Province de l'Équateur, servirent de lieu d'expérience. Ils étaient dispensés de toutes contraintes de la part de l'Etat et suivis de manière spéciale quant à la médecine préventive. Le but était de vérifier l'impact de différents facteurs des pratiques de l'administration coloniale chez les Mongo dans le contexte de la dénatalité. Lire E.Boelaert, La situation démographique des Nkundo-Mongo, CEPSI, Elisabethville 1947, surtout p. 5. Boelaert n'y mentionne pas le projet Nkile. 4. Paul Ngoy, ancien enseignant au petit Séminaire de Bokuma, et plus tard informateur et secrétaire du Père Gustaaf Hulstaert. Voir Bio-bibliographie dans Annales Aequatoria 19(1998)335-39. 5. Nkile: en 1977-78, le terrain a été objet de fouilles archéologiques et de prospection géomorphologiques. Lire J. Preuss, Abschlussbericht und Ergebnisse der Mainze Zaire-Projektes, 1977, Inédit; et M. Eggert, dans Nyame Akuma 13(1978)41 6. V.F. Brabant (1911); Au Congo Belge depuis fin 1933. Il était Commissaire de District. 7. G.A. Schwers (1897). A Congo Belge depuis 1929. Médecin provincial à Coquilhatville depuis 1935. Il a publié une note sur la dénatalité mongo: Les facteurs de la dénatalité au Congo Belge, Aequatoria 7(1944)89-100. ANNEXES1. Extrait du rapport de Monsieur de Waersegger, procureur du Roi(...) Il Je crois pouvoir indiquer à la dénatalité un ,remède qui me paraît efficace. Ce remède, s'il est appliqué loyalement, avec la ferme volonté d'atteindre le but proposé, est de nature à arrêter la disparition des populations de la Tshuapa. Ce remède satisfait aux desiderata des médecins et de tous ceux qui ont étudié les causes de la dénatalité et ont cherché à l'enrayer et notamment des moralistes et des Missionnaires. Si notre action civilisatrice a été précipitée, et si notre politique de production à outrance a eu pour les populations de la Tshuapa des conséquences fâcheuses, si les corvées multiples imposées aux indigènes et les sanctions nombreuses qui leur ont été appliquées ont rendu malheureuses leurs conditions d'existence, si les maladies, la mauvaise alimentation, et la licence des mœurs ont diminué le pouvoir de résistance de la race et ont précipité sa disparition, il est raisonnable de sauver de ce désastre, les éléments encore sains de ces populations décadentes et régressives et de les séparer de leur milieu. Il est logique de grouper les familles encore saines, vigoureuses, de les soumettre à une surveillance médicale sérieuse. Ainsi qu'à une action morale et sociale judicieusement menée qui les acheminent progressivement vers notre civilisation, favorisent ainsi leur adaptation, tout en leur ménageant la tranquillité et la paix indispensable. En d'autres termes cas groupements devront être soumis à une évolution, une adaptation dirigée. Je propose la création de groupements artificiels, extra-coutumiers formant des villages ou de colonies agricoles et composés de ménages monogamiques jeunes, sains de corps et d'une bonne moralité. Ces groupements seront régis par des règlements qui leur seront propres et imposant à chacun des membres des obligations en rapport avec le but poursuivi qui est la conservation des populations et leur adaptation à notre civilisation. Ces groupements seront composés d'indigènes qui accepteront librement d'en faire partie et qui s'engagent volontairement à se soumettre aux obligations imposées aux membres et à en respecter les règlements. Ces groupements seront établis à proximité d'une mission, ils disposeront de terres suffisamment vastes pour satisfaire aux besoins présents et futurs de leurs membres. Ils seront soumis à l'autorité, à la surveillance, au contrôle et aux enseignements d'un missionnaire qui y sera spécialement affecté, et qui pourra recourir à l'autorité administrative pour faire respecter le règlement. Les membres de ces groupements échapperont aux corvées imposées aux indigènes des circonscriptions; ils seront notamment dispensés des travaux routiers, des cultures imposées, construction de gîte d'étape, d'école, de prisons, etc. Ils seront traités avec bienveillance par les autorités territoriales et judiciaires. Les membres de ces groupements feront l'objet d'une surveillance et de soins médicaux sérieux Les indigènes faisant partie de ces groupements seront astreints à des travaux en rapport avec leurs aptitudes et à leurs profits exclusifs. [Le rapport poursuit avec une explication détaillée qui reprend presque littéralement le rapport du Dr Schwers, médecin provincial. Nous n'avons pas e repris cette partie, mais en voici la final] Quel que soit le mérite de cette proposition, j'estime que la création de ces groupements, villages ou colonies agricoles [formés] artificiellement, devrait être tentée. C'est une expérience qui s'impose et qui est susceptible de donner à moins de frais, plus de résultats que celle qui est tentée actuellement chez les Songo, car elle serait pratiquée sur d'autres bases... Au lieu d'agir sur la masse des indigènes, de la chefferie, l'action se limiterait aux éléments les plus sains. Cette création de village ou colonies, présente le grand avantage qu'elle permette des expériences dans plusieurs domaines. Elle favorisera tout d'abord le progrès matériel, en donnant la possibilité aux agronomes d'améliorer les cultures indigènes, de perfectionner les procédés de culture notamment par l'adoption d'instruments plus modernes. Elle aura pour conséquence la création ou l'augmentation de l'élevage parmi les indigènes et l'amélioration de cet élevage. Elle permettra l'exploitation des produits sous la forme de coopérative; elle permettra également d'étudier de près les populations et d'apercevoir si les vraies causes de leur difficulté d'adaptation sont bien celles qui ont été annoncées. La création de ces groupements favorisera également le progrès moral. Elle nous permettra d'avoir sur les membres une action non plus superficielle mais profonde et de les amener à nous par des moyens adéquats. Par une surveillance constante, et des enseignements appropriés, les missionnaires parviendront à hâter l'évolution de ces populations, à les amener sans heurt à notre civilisation, à les adopter réalisant ainsi le but de notre action colonisatrice. J'ajoute que ces groupements artificiels, ces colonies, ces villages, extra-coutumiers répondant à une véritable nécessité, à un besoin qu'éprouvent les indigènes eux mêmes à s'écarter de leur milieu coutumier, car ils sentent eux mêmes qu'ils y sont menacés de disparition. Et, ce fait est significatif, ce sont les indigènes eux mêmes qui demandent la création de pareils groupements. Je joins à la présente étude, à titre simplement documentaire, un projet de règlement pour la fondation d'un village extra-coutumier, projet élaboré spontanément par des indigènes. Coq, le............ Le Procureur du roi DE WAERSEGGER" 2. Le texte de Paul Ngoy sur Nkile: PROJET DE LA FONDATION DE VILLAGEDepuis 1937, nos Missionnaires nous ont souvent exprimé leur étonnement de la grande mortalité, suivie de la dénatalité dans nos villages. Petit à petit nous avons compris la gravité de la question, avisés par les conseils maternels de la Sainte Eglise. De là, nous avons pu constater que la dénatalité est causée souvent par les maladies vénériennes. Dans nos conférences et nos entretiens, nous traitons toujours ce sujet de "DENATALITE" que nous voulons énergiquement combattre. Jusqu'à aujourd'hui, nous n'avons trouvé aucun moyen de nous sauver de cet horrible fléau. D'autre part, nous sommes entourés par des maladies qui favorisent la dénatalité et qui sont des obstacles à la natalité. Heureusement que nos braves Missionnaires nous disent encore: vous pouvez vous sauver vous mêmes si vous voulez. Mais ce n'est pas à la ville ni au village natal qu'on doit se sauver, car même au village, la dénatalité règne en maître. Pour redresser notre pays qui est tombé sous le fardeau de la dénatalité, nous avons conçu un petit moyen que nous croyons certainement pouvoir nous sauver encore. Nous voudrions fonder un nouveau village paisible afin de nous conserver purs de corps et d'âme. Je crois qu'avec l'aide nécessaire nous pourrons nous conserver et aussi améliorer notre situation tant vitale que morale, et redresser le bilan de notre natalité. Dans ce petit village chrétien nous aimerions mener une vie de bons chrétiens et de bons citoyens. Puis nous promettons tous de rester fidèles aux enseignements du Gouvernement. En même temps nous désirons contribuer à la création du paysannat indigène dans notre région. Nos exploitations agricoles et notre élevage pourront servir à alimenter les marchés de Coquilhatville et de Flandria ou d'autres centres éventuels. Notre exemple pourra servir de stimulant et d'instruction aux autres indigènes de la région et favoriser ainsi la propagande agricole et la propagation de nouvelles cultures ou de meilleures méthodes agricoles. Nous espérons de cette façon contribuer au progrès économique de la Colonie. Nous prions nos autorités de bien vouloir nous permettre cette création d'un nouveau village. I. CONDITIONS D'ADMISSION1. Ne sont admis en notre village que des jeunes gens d'age moyen, qui accepteront de bon cœur de mettre en pratique nos règlements. 2. Les candidats doivent s'engager à demeurer au village et à participer aux travaux communs de la coopérative pour un terme minimum de 6 ans. 3. Le candidat doit se présenter au chef du village avec une demande écrite dans laquelle il prend l'engagement dont question à l'article précédent et promet de se soumettre aux règlements du village. 4. L'admission se fait par l'assemblée des habitante résidants, après examen de la demande du candidat, de sa situation vis-à-vis du Gouvernement, de sa famille et de l'Eglise. 5. L'admission se fait par les 2/3 des votes, confirmé à l'unanimité. Le consentement du chef du village. 6. L'admission n'est définitive et n'obtient ses effets qu'après l'approbation de l'Administrateur, Chef du Territoire, et du chef de la circonscription indigène auxquels le Chef du village agricole soumet la candidature. 7. Il est défendu d'admettre les parents et les étrangers qui ne satisferont pas aux conditions d'admission détaillées ci-dessus. II. RÈGLEMENT1. Nous proposons d'observer les lois du Gouvernement. 2. De pratiquer les commandements de la Sainte Eglise. 3. Chacun doit avoir sa femme légitime à côté de lui. La polygamie est défendue. 4. Quand les femmes se rendent au marché éloigné, elles seront accompagnées de leurs maris. 5. Il est strictement défendu de toucher à la femme d'autrui, chacun gardera sa propre femme. 6. Nous nous opposons à la croyance de la sorcellerie et de toute autre croyance païenne. 7. Il est défendu de fumer du chanvre. Cette plante ne sera jamais cultivée sur nos terrains ou vendue en notre village. 8. Il est aussi défendu de se livrer à l'ivrognerie. 9. Les jeux de hasard sont strictement défendus. 10. Les danses indécentes sont bannies du village. 11. Personne ne peut se battre avec sa femme en public. 12. Les parents des résidants et les étrangers ne peuvent séjourner au village qu'avec le consentement du Chef du village, qui veillera à ce que les visiteurs soient en règle avec l'administration et respectent les règlements. III. PUNITIONSLes coupables de notre village seront jugés comme suit: 1. Celui qui ne se soumettra pas à nos règlements, sera renvoyé. 2. Pour chaque tort, le coupable sera puni d'une amende de 10 francs à 25 francs tout au plus, 5 francs pour les frais de jugements et 2,50 francs pour l'encre. Les frais du jugement ne sont payés que par le coupable. 3. Les enjeux des jeux de hasard seront confisqués au profit de la caisse commune. 4. Tout l'argent qui provient des amendes et des frais de jugement sera versé dans la caisse commune. IV. JUSTICE1. Excepté dans les cas urgents, le tribunal ne siège qu'en dehors des heures de prière ou de travail. 2. Les juges, le greffier et les policiers présentés à la séance ont droit à une rémunération à déterminer ultérieurement conformément aux fonds dont la caisse commune dispose. V. FINANCES1) La caisse commune est alimentée: a/ par les bénéfices de la vente de produits de la coopérative. b/ par les amandes et les recettes du tribunal. c/ par des subsides éventuels. 2) La caisse commune est utilisée: a/ constructions d'intérêt public chapelle, école. b/ achat de pirogue au service de la communauté. c/ achat d'instruments et d'outils servant à l'intérêt de la communauté. d/ achat des fournitures de bureau pour l'administration du village et pour le tribunal. e/ aide aux indigènes du village. F/ contribution à la dot des résidants. G/ contributions aux oeuvres de bienfaisance, des frais de l'enseignement. 3) Toute disposition des fonds communs sera l'objet d'un examen par l'assemblée des résidants. L'approbation de la dépense se fait par un vote des 2/3 confirmé par le consentement du chef. 4) Tout ce que les résidants gagnent par leur industrie personnelle demeure leur propriété privée. VI. SORTIE DU VILLAGE1. Celui qui quitte le village, pour quelque raison que ce soit, ne peut emporter que ses effets strictement personnels, les outils et instruments communs restent la propriété de la communauté. 2. Il perd son droit de participation aux terrains de chasse ou endroits de pêche éventuels du village. 3. Celui qui quitte après avoir terminé son engagement, dont question au chapitre I article 20, peut vendre les produits de ses plantations personnelles; mais les cultures sur pied, uniquement à l'un des membres du village ou à la coopérative. 4. Il peut enlever de sa maison les ndele et les portes, ou bien les vendre ou les céder en entier à un des résidants du village ou à la coopérative. 5. Celui qui veut quitter avant d'avoir fini son terme, dont question au chapitre I article 20, doit au préalable obtenir l'autorisation du chef du village et de l'assemblée qui décident par un vote des 2/3. A défaut de cette autorisation, le démissionnaire perd tout son droit sur ses plantations et sur la maison, et ne peut emporter que sa propriété mobilière. 6. La confiscation, dont question à l'article précédent, s'applique de plein droit à celui qui est renvoyé du village. 7. Le renvoi est décidé par ordre du chef du village après consultation de l'assemblée des résidants, qui décident par la majorité simple. 8. L'Administrateur, Chef du Territoire et le chef de la circonscription indigène, seront avertis officiellement de la décision de renvoi et de tous les départs quelconques. VII. NOS TRAVAUXNous avons choisi comme travaux: 1. de faire des cultures vivrières diverses. 2. d'établir, dans la mesure de nos possibilités, une plantation de palmiers. 3. l'élevage des animaux domestiques et d'oiseaux de basse-cours. 4. l'élevage des cochons se fera en étables ou en cultures pour éviter les destructions des cultures et obtenir un meilleur produit. VIII. NOTRE JOURNÉENous ne voulons pas vivre en paresseux, c'est pour cela que nous avons divisé notre journée comme suit :AVANT MIDI: 6.45 prière en commun; 7.30-12.00 travail; APRES MIDI: 14.00 - 16-30 travail; 18.30 prière en commun. NOTES a) Chaque mercredi, il y aura une réunion générale. A cette réunion, chacun dira à son tour ce qu'il croira utile au bien commun. b) Nous aurons notre Eglise. Nous observerons la loi du Dimanche et nous nous abstiendrons de tout travail lourd ou servile. IX. ADMINISTRATIONNous proposons d'avoir notre propre chef ou capita, un greffier et un caissier, nos trois juges, un policier et une sentinelle. Nous souhaitons que notre village agricole soit constitué en sous-chefferie jouissant d'une large autonomie, tant administrative que judiciaire. Nous demandons l'exonération des corvées diverses. Mais nous entretiendrons les chemins tant ceux du village que ceux qui y mènent. Nous demandons que nos membres ne soient pas astreints à soumettre leurs différends au tribunal de la chefferie. X. LE TERRAINNous avons choisi le terrain de NKILE (entre la mission de Bokuma et Ikuwa, à la rive gauche de la rivière Ruki) qui appartient au nommé BAYAKA Pierre et ses enfants. Paul NGOI, l'un des fondateurs du village, a aussi sa part à ce terrain parce que l'héritage lui revient aussi, et il a demandé à BAYAKA Pierre la permission, de façon que tout ce terrain soit entièrement à sa disposition. BAYAKA Pierre a marqué son accord, donc dès aujourd'hui, P. NGOI devient le propriétaire de ce terrain. D'autre part, nous avons choisi de préférence ce terrain parce qu'il est près de la mission de Bokuma. Nous appartenons tous au Territoire d'Ingende et à la mission de Bokuma. 3. Rapport d'inspection du Médecin provincial, Dr G. Schwers du 22 août au 11 septembre 1945"4. Y-a-t-il moyen de sortir de cette impasse ? Il ne faut pas penser un moment les ramener, de gré ou de force, dans leurs villages d'origine, pour qu'ils y vivent à la façon de leurs pères. Les vieux serviteurs des Blancs retournent volontiers se reposer au village après carrière faite, mais les jeunes ne s'y habituent plus. L'évolution ne fait jamais de pas en arrière et rien ne pourra contraindre la jeune génération, sortie de son milieu à redevenir les "Basendji" amorphes, les bêtes de somme bonnes à tout faire, qui peuplent les villages coutumiers. Mais on ne peut imaginer la création non loin des centres, de "villages d'essai" ou "villages de sélection". On s'efforcera de rassembler, dans ces villages nouveaux, les jeunes familles indigènes, bien portantes, physiologiquement saines, ayant perdu contact avec leur milieu coutumier (fils de travailleurs par exemple) et ne trouvant pas à s'employer dans l'administration et dans les entreprises privées. Ces villages seront des groupements "néo-coutumiers" ils seront habités par "évolués", ce terme étant compris dans le sens bergsonien, c'est-à-dire présentant une différenciation progressive en corps de métier, cette différenciation professionnelle correspondant à la différenciation et au perfectionnement de l'outillage. Les premiers habitants de ces villages auront appris leur métier dans les centres européens; ensuite, l'enseignement et la tradition artisanales se perpétueront dans le village même. La grande masse de la population sera évidemment formée par les agriculteurs, qui auront appris à considérer l'agriculture comme un métier spécial, digne du mâle. Aux travaux ordinaires des champs s'ajouteront la culture maraîchère et le petit élevage. Autour des agriculteurs graviteront une foule d'autres petits métiers distincts: menuisiers, forgerons, potiers, vanniers et bien d'autres. Cette nouvelle floraison des arts et métiers indigènes, bien qu'elle doive être déclenchée par l'Européen, n'aura rien d'artificiel: elle ne sera que la reprise d'une évolution normale, commune à toutes les races humaines, mais qui, chez les Noirs était restée engourdie pendant des siècles, pour la raison que j'ai exposée plus haut. Il va de soi que, pour que cet essai réussisse, il faut que l'on renonce aux "travaux éducatifs" lorsqu'ils ne sont que des corvées déguisées, et surtout que l'on cesse de lever en masse des populations entières, pour les employer pendant de longs mois comme de simples manœuvres, étouffant ainsi leurs dispositions naturelles à là spécialisation. Qu'on veuille bien ne pas voir, dans les lignes qui précèdent un Programme de "repeuplement" pour lequel je n'ai pas la compétence voulue; la question est trop complexe et comporte encore trop d'inconnus. Ces lignes ne veulent être que le commentaire d'un thème que je crois exact: livrées à elles-mêmes, les races décadentes comme les Kundu disparaîtront par le mécanisme impitoyable de la sélection naturelle. Toutefois, une sélection artificielle basée sur l'isolement des noyaux sains, est capable de les régénérer. Si nous parvenons à protéger les noyaux sains, nous devons les faire progresser suivant les doctrines qui lient l'évolution de l'homme à celle de l'outil: longtemps avant de devenir un "homo sapiens" notre espèce a conquis sa place sur le globe grâce à ses facultés de "homo faber". 4. LETTRE de G. Hulstaert à Edmond Boelaert du 7 janvier 1946 (Arch. Aeq. Corr. Hulstaert) (Traduction du néerlandais par Honoré Vinck)Cher Père Mon, J'ai eu Mr le Procureur de Waersegger longtemps chez moi samedi passé pour parler de la dénatalité en vue de la réunion de leur commission. Il veut prouver qu'il y a une réelle dénatalité, ce qui est encore contredit par certains, et trouver les moyens et projets pour y remédier. Il dit qu'il est décidé de réagir fermement. Il n'est pas très porté vers le plan Nsongo, aussi parce que c'est un seul plan. Le Gouverneur Général voudrait le faire décisif: si cela n'aide pas, alors on laisse aller le tout. Le procureur est contre cela. Aussi en ce qui concerne le plan Nsongo: on oblige des Nsongo émigrés de retourner et de quitter les missions etc..; cela ne peut pas être favorable pour le plan. Il veut donc à côté de cela encore une autre chose. Il pense comme Schwers que si les gens reçoivent un nouvel idéal pour vivre et procréer, ils le feront. Je me déclare d'accord mais je trouve qu'il est difficile de trouver un tel idéal. Le christianisme avance trop lentement et avec la laïcisation galopante (dit le Procureur lui-même) on ne pourra pas avancer une telle chose car on refusera tout d'avance. Il parle de l'exemple du kimbanguisme qui est un tel nouvel idéal et qui incite les hommes à la maison et en relégation à procréer dans un but nationaliste. Des projets pratiques de sa part: des îlots (il pense à un genre de ferme-chapelle, mais on ne peut pas nommer ce nom) au fond le système du Nkile de Ngoy, mais complètement aux mains de la mission (catholique ou protestante) avec des crédits pleins de l'Etat mais sous condition que la mission puisse librement appliquer son système d'éducation. Il me demande: est ce que la mission le voudra et le pourra ? Je réfère bien sûr à Monseigneur, mais j'ajoute que moi j'y vois une possibilité. Encore ceci: à part les îlots, et où c'est possible, toute une région autour d'une mission laisser librement influencer: agriculture, moralité, contrôle des tribunaux etc. Dans une semaine, quand il reviendra, nous devrons continuer notre entretien. [Le père Hulstaert demande alors au Père Boelaert des statistiques comme preuve de la dénatalité et suggère que le Procureur et Monseigneur se concertent avant la réunion. Il annonce une campagne de presse sur la question]. |
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